Lors d'une récente vente aux enchères, la présence d'un habit de haut-fonctionnaire de la marine a été particulièrement remarquée et a fait l'objet d'une belle bataille entre collectionneurs. Il s'agit d'un magnifique habit brodé de grand uniforme d'ingénieur hydrographe en chef du modèle 1853, modifié en 1870 (perte de la couronne impériale sur les boutons et sur les ancres au bas des basques), puis en 1889 (mise en place d'un dispositif pour accrocher les pattes mobiles brodées qui furent adoptées cette année-là), avant de disparaître en 1900, comme presque tous les habits richement brodés (poitrine, basques, écusson de taille, collet et parements) des hauts-fonctionnaires de la Marine, lors de l'adoption d'un habit brodé plus sobre (écusson, collet et parements uniquement).
Rappelons que l'appellation de haut-fonctionnaire s'appliquait à la haute hiérarchie des corps assimilés de la Marine jusqu'en 1912, alors que jusque là les amiraux étaient seuls à être "officiers généraux". Et ce n'est qu'en 1923 que le bouton des amiraux put être porté par les officiers généraux des corps assimilés.
Les distinctives des ingénieurs hydrographes étaient les branches d'olivier et le velours noir. On retrouve ces branches d'olivier comme motif des différentes broderies, broderies qui sont portées aux parements et au collet sur du velours noir. Attention, les broderies d'écusson de taille sont réalisées directement sur le drap noir de l'habit ; il ne s'agit pas d'un écusson rapporté / cousu sur l'habit, disposition adoptée par certains petits malins qui pensent faire une bonne affaire en vendant des habits "bidouillés".
Nous pouvons maintenant tenter d'identifier le propriétaire initial de cet habit. Ce peut être relativement facile s'agissant du corps des hydrographes car ce dernier n'avait a sa tête qu'un seul officier titulaire du grade d'hydrographe en chef, lequel serait remplacé en 1900 par celui de directeur d'hydrographie, puis en 1921 d'ingénieur général hydrographe, qui ne comporterait deux classes qu'à partir de 1938.
Sur la période de 1889 à 1902, il n'y eut que quatre hydrographes en chef :
Jean-Jacques Bouquet de Lagrye (depuis le 19 avril 1886)
Eugène Manen (depuis le 1er janvier 1891)
Adrien Germain (depuis le 30 juillet 1894)
Hippolyte Héraud (depuis le 8 juin 1895)
Malheureusement, nous ne disposons d'aucun détail supplémentaire pour les départager... Mais nous disposons de la photo de l'hydrographe en chef Manen, trouvée sur le site "Musée des étoiles", qui exclut que ce dernier soit le propriétaire de l'habit de cette récente vente aux enchères : la forme du col ne convient pas.
Au sujet du col, la tendance générale à la fin du XIXe siècle était augmentation de sa hauteur et l'adoption d'une forme moins arrondie, plus à angle droit. D'ailleurs, à partir de 1902, le col fermerait avec des agrafes anglaises. Nous pensons donc que l'habit a appartenu à Adrien Germain ou à Hippolyte Héraud...
Ce magnifique habit a trouvé acquéreur à 5 000 euros, auxquels il a fallu ajouter 28,6% de frais de vente, soit un habit à 6 430 euros !
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