Ces photos nous ont été aimablement communiquées par M. Bernard Ollive, petit-fils de l'amiral Emmanuel Ollive qui servit dans le régiment des canonniers marins et les canonnières fluviales pendant la Première Guerre mondiale.
Comme en 1870, l'Armée connaissait une pénurie en pièces d'artillerie de gros calibre et la Marine proposa d'emblée de lui céder les canons sans emploi dont elle disposait, avec les munitions et le personnel nécessaires. Elle mit sur pieds un régiment de canonniers marins, placé sous le commandement du capitaine de vaisseau Amet (neveu du commandant du fort de Montrouge en 1870-71), disposant de neuf batteries armant des canons de 14 et de 16 cm. Le 7 octobre 1914, sept batteries furent envoyées dans la région de Toul, deux dans la région de Verdun.
Sous les ordres du capitaine de frégate Grandclément, le lieutenant de vaisseau Ollive se trouvait alors à la tête des marins armant la batterie du bois des Blusses, près du fort de Liouville, fort Séré de Rivières copieusement bombardé en septembre et dont l'artillerie avait été rendue quasi-inopérante. Affecté le 15 septembre au régiment des canonniers marins, Ollive était breveté canonnier ; il venait de la 5e région maritime (Toulon), après une affectation comme 2e officier canonnier à bord du cuirassé Mirabeau.
Les affûts des canons furent montés sur des plates-formes bétonnées, coulées par les marins. Ils furent plus tard adaptés pour permettre le tir à un site plus important que les 15 degrés du service à bord, car il fallait pouvoir profiter d'une plus grande portée ; après modification, les canons de 14 cm purent tirer à 15 km.
Le lieutenant de vaisseau Ollive est ici photographié avec ses canonniers. Au front, la casquette de mer introduite en octobre 1913 est souvent adoptée, bien avant son autorisation formelle de décembre 1915. Depuis mai 1912 le veston de cuir peut remplacer les effets de drap en tenue n°3.
Les quartiers-maîtres et matelots canonniers sont dans diverses tenues, adaptées à la vie en campagne... et à la corvée de patates (noter la présence d'un tonneau de cambusard, essentiel pour le maintien du moral). Le fort de Liouville restait sous la responsabilité de l'Armée, ce qui explique la présence de deux "terriens".
Chaque pièce était sous l'autorité directe d'un second maître canonnier, homme à la casquette et au veston à deux rangées de boutons. Il se distingue ici par un insigne spécifique sur la manche gauche : deux canons croisés brodés en or qui montrent qu'il était titulaire du certificat d'aptitude aux fonctions de chef de section d'artillerie. Cet insigne avait été introduit en décembre 1906.
Le régiment des canonniers marins servit jusqu'à la fin de la guerre, ses batteries étant parfois fixes, parfois mobiles, sur péniche, voire sur voie ferrée pour les très gros calibres, au sein de la troisième division de la Réserve générale d'artillerie lourde.
Nous aurons l'occasion de poster encore des photos qui retracent la guerre d'Emmanuel Ollive et l'épopée de ce régiment qui reçut un drapeau – le deuxième de la Marine – créé par un arrêté du 10 décembre 1917.
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