Le fonds de la BNF recèle des trésors. Comme cette photographie de deux décorés de la Médaille militaire, prise le 15 mars 1927. Deux sous-mariniers que distinguent leurs insignes de bras. Pour le maître de gauche, l'insigne est brodé en or et il est surmonté de cinq chevrons d'ancienneté, soit trois années d'affectation sur un ou plusieurs navires opérant sur un théâtre de guerre entre 1914 et 1918. Pour le quartier-maître à droite, l'insigne est brodé en soie rouge.
"Quoi de plus courant?", pourriez-vous dire... Et pourtant, voir un quartier-maître décoré de la Médaille militaire est de nos jours pratiquement impossible... En effet, tous les engagés de longue durée de la marine, au moins titulaires du Brevet d'Aptitude Technique ont vocation à être promus à terme au grade de second maître et les conditions d'attribution de la Médaille militaire conduisent à ne la conférer que très majoritairement à des officiers mariniers supérieurs. En dehors des cas de récompense pour un long engagement dans les armées et leurs réserves, les conditions d'attribution actuelles précisent qu'il faut au moins huit ans de service, avoir été cité à l'ordre de l'armée, ou avoir été blessé au combat ou en service commandé, ou s'être signalé par un acte de courage et de dévouement... Pour les jeunes militaires, la Médaille militaire n'est donc souvent conférée qu'à titre posthume.
Dans les années 1920, mise à part la croix de guerre TOE, créée par la loi du 30 avril 1921, les seules récompenses possibles en cas d'action d'éclat étaient la Légion d'honneur et la Médaille militaire. Depuis existent en plus l'ordre national du Mérite, la croix de la valeur militaire et la médaille d'or de la défense nationale avec citation...
La situation était bien différente au dix-neuvième siècle. Ainsi, nos recherches sur la guerre de 1870-71 nous conduisent à indiquer que de nombreux quartiers-maîtres, matelots, apprentis-marins, voire novices, ont été récompensés par la Médaille militaire à l'issue de ce conflit. Ils ont été cités – en 1914-1918 leur aurait été attribuée la Croix de guerre – ou non.
Près de 60 quartiers-maîtres et matelots ayant participé au siège de Paris ont reçu la Médaille militaire. C'est le cas également pour plus de 15 marins de ces grades de l'armée de la Loire, 30 de l'armée du Nord, et 12 embarqués sur les bâtiments de la marine impériale puis de la République. On en trouve même 5 pour leur conduite au cours du siège de Strasbourg... Un quartier-maître de canonnage a même reçu la Légion d'honneur pour son action à bord de la chaloupe-canonnière Sabre pendant le siège de Paris ! L'action des marins au cours de ce conflit, trop souvent occultée, sera à découvrir dans un futur ouvrage en cours de recherche / rédaction...
Revenons aux deux marins de notre photographie. Elle interroge pour le maître de gauche. Pourquoi cet officier marinier n'est-il pas en grande tenue, en redingote, pour recevoir sa décoration, mais en simple tenue de service, avec veston ? Nous n'avons pas la réponse.
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