Alors qu’ils avaient été envoyés à Strasbourg pour constituer une flottille destinée à appuyer les actions de l’armée du Rhin de Mac-Mahon, les marins du contre-amiral Maurice Exelmans se trouvèrent pris au piège dans la place Strasbourg après la défaite de Frœschwiller le 6 août. Cette dernière livrait l’Alsace aux armées allemandes. Les marins participèrent dès lors à la défense de la ville au cours de laquelle leur action fut particulièrement remarquée.
La défense de la place avait été placée sous la responsabilité du général Uhrich, commandant la 6e division territoriale. En plus de ces deux officiers généraux, la mémoire populaire a retenu le nom d'un deuxième marin, le capitaine de vaisseau Abel Bergasse du Petit-Thouars, chef d'état-major de l'amiral commandant en chef la flottille. Sur ce dessin, l'amiral est à droite (comme Uhrich, il est douteux qu'Exelmans se soit rendu sur les remparts en petit uniforme, avec chapeau...), son chef d'état-major est à gauche, en petite tenue avec redingote.
Le 7 août, alors qu'aucune batterie flottantes démontable n'était encore arrivée, l'état de siège fut décrété à Strasbourg. D'abord bloquée à Belfort, une seule batterie semble être arrivée à destination en provenance de Toulon par chemin de fer. Mais elle ne fut pas remontée... Avec les premiers équipages de ses bateaux et les ouvriers destinés à les remonter sur place, Exelmans constitua une petite troupe qu'il mit à la disposition d'Uhrich à partir du 10 août, jour de l'encerclement complet de la ville : les 123 ressortissants du ministère de la Marine, 49 marins et 74 ouvriers, allaient participer à La défense de la ville, les premiers les armes à la main – la légende veut que pendant la tentative de sortie du 2 septembre, certains marins aient combattu avec des sabres de bord 1833 ; cependant on ne parle pas de haches comme lors du combat ultérieur du Bourget lors du siège de Paris – les seconds en soutien des sapeurs-pompiers de la ville, car les 39 bombardements de Strasbourg occasionnèrent de très importants dégâts et incendies. Exelmans s'y vit attribuer la défense d'un secteur de l'enceinte fortifiée (le front nord), avec ses marins et près de 3 000 hommes de la garde mobile et des rescapés des défaites d'Alsace.
A partir du 5 septembre, la nouvelle de la défaite de Sedan se propagea à l’initiative des assiégeants pour miner la volonté des défenseurs : tout espoir de retour offensif des armées françaises destiné à sauver Strasbourg s’évanouissait donc. La défense se poursuivit néanmoins jusqu’au 27. Alors, le général Uhrich décida en Conseil de siège que toute défense étant désormais vouée à l’échec, l’heure de la reddition était venue pour limiter les souffrances de la population. Une posture souvent adoptées par les défenseurs de place, confrontés aux actes barbares allemands, contraires au "droit des gens" : les assiégeants s'attaquaient d'abord à la ville et aux civils, plutôt qu'aux remparts et aux militaires les défendant dans la perspective d'un assaut, ce dernier étant plus exigeant en troupes que le "simple" bombardement et l'action psychologique.
Les défenseurs de Strasbourg sortirent le lendemain et déposèrent les armes ; ils partirent en captivité à Rastadt, les marins ayant à leur tête du Petit-Thouars. Ce dernier y resterait jusqu’à la fin de la guerre, plus haut gradé assurant l’accompagnement des 15 000 prisonniers français dans cette ville.
Les quatre portraits ci-dessous nous présentent le général de division Uhrich, le contre-amiral Exelmans et du Petit-Thouars, pour ce dernier bien après ces événements puisqu'il est ici vice-amiral.
Exelmans termina sa carrière comme préfet maritime à Rochefort avec le grade de vice-amiral. Il y mourut d'une chute de cheval... Dans la 2e photo en partant de la gauche, il est en petit uniforme avec une épée non réglementaire qui paraît suspendue à deux bélières, alors que le porte-épée est de mise. Le cliché a été pris entre 1864, date de sa promotion au grade de contre-amiral, et 1870, car ici commandeur de la Légion d'honneur. Il fut élevé à la dignité de Grand officier le 6 octobre 1870, décoration qu'il arbore sur la 3e photo. Cette fois, l'épée et son port paraissent conformes au règlement.
Du Petit-Thouars fut promu vice-amiral en 1883 et fut désigné préfet maritime de Cherbourg l'année suivante, puis à Toulon en 1886, et enfin commandant en chef l'escadre de la Méditerranée en 1888. C'est dans ce poste qu'il décéda en 1890. Cette photo a été prise entre 1886, année de son élévation à la dignité de Grand officier de la Légion d'Honneur, et 1890. En petite tenue avec redingote, du Petit-Thouars arbore la plume blanche à son chapeau, réservée aux vice-amiraux commandant en chef à partir de 1853, aux vice-amiraux préfets maritimes à partir de 1875 et aux vice-amiraux membres du Conseil supérieur de la marine à partir de 1891.
Le sujet de la participation des marins à la défense de Strasbourg sera traité dans notre ouvrage en cours de rédaction "La marine et les marins dans la guerre de 1870".
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