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1940. Remise de décorations sur le sous-marin Orphée

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Grâce aux ressources de l'ECPAD, revenons sur un épisode de la guerre sous-marine française au début de la Deuxième Guerre mondiale.

Le 6 mai 1940 au matin, le sous-marin Orphée, de retour d'une mission effectuée en mer du nord, regagnait sa base de Cherbourg. À peine arrivé dans l'avant-port, il était accosté par une vedette de la marine amenant à bord le vice-amiral d'escadre Le Bigot, préfet maritime.

L'Orphée était un sous-marin de 630 tonnes du type Diane, construit à partir de 1929 au Havre et mis en service en 1933. Il traverserait la Deuxième Guerre mondiale sans dommages et fut désarmé en 1946.

Il disposait de 6 tubes de 550 mm à l'avant et de 2 tubes de 400 mm à l'arrière. Il faisait partie en 1940 de la 18e division de sous-marins.

Le vice-amiral préfet maritime venait apporter à l'équipage de l'Orphée les félicitations de la Marine et remettre au sous-marin, ainsi qu'à dix-sept de ses officiers, officiers mariniers et quartiers-maîtres, la croix de guerre avec étoile de bronze. C'est qu'en effet l' Orphée venait d'accomplir un exploit, le torpillage du sous-marin allemand U51, qui fut ainsi relaté par l'hebdomadaire L'Illustration dans son n° 5072 daté du 18 mai 1940 :

" Depuis 48 h, l'Orphée patrouille à l'ouest du Skagerak, dans le secteur oriental de la mer du Nord. À 3 heures du matin, il est en plongée, par une mer belle, avec une bonne visibilité et peu de vent. Son équipage a l'impression d'un exercice du temps de paix. Vers 11 heures, son commandant, désireux de prendre un peu de repos après deux jours sans sommeil, s'étend tout habillé sur sa couchette. Vers 14 heures et quelques minutes, un quartier-maître le réveille. À 14 h 15 exactement, l'enseigne de vaisseau de quart aperçoit un sous-marin qui vient entre deux tours d'horizon, au périscope (360°). Le commandant monte dans le kiosque, où il trouve l'enseigne cramponné à son périscope. Il s'empare de l'appareil et aperçoit une autre masse noir, un deuxième sous-marin.

Un premier problème se pose : l'identification des sous-marins. Pour gagner du temps, l' Orphée plonge à 18 mètres pour permettre la consultation du carnet d'identification. Un doute subsiste. Est-ce un sous-marin anglais ? À 14 h 18, le périscope est rehissé pour une observation plus complète ; un officier britannique regarde à son tour et déclare qu'il ne s'agit pas d'un sous-marin anglais. Le commandant donne alors l'ordre de placer les éléments de lancement de torpilles sur le premier sous-marin. À 14 h 21, le commandement de feu est donné et les torpilles lancées et, à 14 h 23, tandis que l' Orphée plonge à 50 mètres pour éviter la réaction du deuxième sous-marin ennemi, deux explosions violentes se produisent qui font chavirer le compas gyroscopique et projettent tous les plats de l'équipage sur le plancher du poste avant : les torpilles ont atteint leur but. Il est 15 heures et l'affaire est terminée. L' Orphée reprend la vue au périscope. Il n'y a plus rien sur la mer. Il décide de faire route sur le lieu du torpillage pour voir s'il demeure des épaves. Aux abords, il entend les hélices du second sous-marin. La situation de l'Orphée commence à devenir pénible, car il est en plongée depuis 14 heures, obligé de marcher sur ses batteries et devant bientôt se préoccuper de remonter à la surface pour les recharger.

Néanmoins, il continue à faire route en plongée pour s'éloigner du deuxième sous-marin. vers 19 heures, il aperçoit un gros avion Dornier qui fait des recherches dans le secteur. Le sous-marin étant immergé et les eaux de la mer du Nord présentant une certaine opacité, l'avion ne le distingue pas. À 21 heures, la nuit commence et le sous-marin remonte en surface pour recharger ses batteries. Malheureusement, il fait un clair de lune désastreux. À partir de minuit, l'aviation allemande a pris contact avec l' Orphée. Appareils Dornier venant du nord, appareils Heinkel venant de l'est. La chasse de l'aviation allemande dure 48 heures. Pendant ces 48 heures, l'Orphée effectue 14 plongées. Il passe 37 heures sous l'eau. Au cours de ces 37 heures de plongée, il doit franchir à l'aveuglette des champs de mines, côtoyer, pour ne pas dire plus, des bancs de sable. Enfin, il réussit à regagner sa base sans avarie.

Pour apprécier toute la valeur et toute la qualité de cet exploit, nous nous bornerons à ajouter que c'est la première fois depuis la guerre qu'un sous-marin français torpille un sous-marin ennemi et que c'est également la première fois qu'un submersible est pourchassé pendant 48 heures par l'aviation adverse."

Ci-dessous, le préfet maritime procède à la remise de décorations sur le pont du sous-marin. Il était accompagné par son aide-de-camp, l'enseigne de vaisseau Grandchamp-des-Raux, que l'on distingue à gauche par le port des aiguillettes sur l'épaule droite.

Plusieurs éléments sont intéressants sur les clichés ci-dessous.

A gauche, ce sont les décorations et la fourragère de l'amiral Le Bigot. L'amiral porte ses décorations "imbriquées", ce qui est toujours réglementaire mais peu courant. Il porte une fourragère attribuée à titre individuel, sans doute acquise à la suite de son action comme capitaine de compagnie au 2e régiment de fusiliers marins à Dixmude, à Steenstraate, et à Nieuport ; il fut cité à l'ordre de l'Armée navale en juin 1915. Cette fourragère est toutefois bizarre car on ne perçoit pas son aiguillette en métal.

A droite, ce sont le port du sabre par l'amiral et le veston du premier maître au premier plan.

Le port du sabre avec le veston fut institué le 22 janvier 1931, après une interruption depuis le 11 juin 1923 qui mettait fin à une pratique adoptée le 21 mai 1917 (en temps de guerre, on mettait davantage le veston que la redingote, et le sabre était sans doute plus cohérent avec l'état de belligérance). Si initialement ce sabre était suspendu à des bélières noires, il est manifeste que ces bélières étaient en 1940 de la couleur adoptée pour les deux grades d'officiers généraux – bleu et or pour les contre-amiraux et ponceau (rouge) et or pour les vice-amiraux –, une coquetterie nullement prévue par l'arrêté de 1931.

Le lecteur attentif remarquera enfin la différence de coupe entre le veston du premier maître ci-dessous à droite et le veston du maître décoré ci-dessus. Celui du premier maître est à coupe droite (une seule rangée de boutons) et à col fermé, alors que celui du maître est à coupe croisée (deux rangées de boutons) et à col ouvert. Ce dernier a donc eu le temps de se mettre en conformité avec la circulaire du 26 juin 1939 qui adoptait la coupe croisée et le col ouvert, caractéristiques du veston des officiers depuis le 18 avril 1918...

Pour terminer, voici une photo amusante dont la légende indique qu'il s'agit du siège du commandant en surface, sans doute uniquement par beau temps, ici essayé par le bosco qui l'a installé.




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