Les albums de campagne des campagnes Jeanne d'Arc sont toujours très intéressants. Nous analysons ici quelques photos et un document issue de celui de la campagne 1919-1920.
Pour la première campagne d'application des enseignes de vaisseau après la Première Guerre mondiale, le vieux croiseur "à six tuyaux" Jeanne d'Arc, qui commença son service au profit de l'école d'application, resta en Atlantique et en Méditerranée en faisant de nombreuses escales. Partant de Brest, il visita successivement Lisbonne, Funchal (Madère), Hamilton (Bermudes), Annapolis, La Havane, La Nouvelle-Orléans, Colon (Panama), Pointe-à-Pitre, Fort-de-France, Dakar, Santa-Cruz (Canaries), Gibraltar, Marseille, Toulon, Golfe-Juan, Ajaccio, Bizerte, Tunis, Naples, Corfou, Constantinople, Beyrouth, Port Saïd, Malte, Bone, Alger, Oran ; retour à Brest.
Voici l'état-major du bâtiment et les officiers élèves, enseignes de vaisseau de 2e classe et mécaniciens principaux de 3e classe (ingénieur mécanicien de 3e classe à partir de 1925). On notera parmi eux deux officiers élèves étrangers aux casquettes particulières, dont nous ignorons la nationalité. Nous observons aussi quelques particularités chez certains officiers : des chevrons d'ancienneté sur des manches gauches (premier chevron pour une année effective d'embarquement dans un théâtre d'opérations, un chevron supplémentaire par semestre en plus) et des fourragères obtenues à titre individuel, puisque la Jeanne d'Arc n'a pas été distinguée au cours du premier conflit mondial.

La photo ci-dessous nous montre de jeunes enseignes de vaisseau de 2e classe en tenue n°3 en effets blancs et casque. On remarquera les vestons blancs à "cols officiers" qui furent remplacés par des veston à cols ouverts en 1926 (remarque personnelle de l'auteur : pas sûr que nous ayons gagné au change). Sur le veston blanc, le grade des officiers de marine était alors signifié par des pattes d'épaule blanche introduites en 1912. Elle ne furent remplacée par des pattes d'épaule en drap bleu (presque noir), comme nous les connaissons aujourd'hui, qu'en 1926. A cette époque et depuis 1912, les pattes d'épaule des officiers des corps assimilés étaient de l'étoffe distinctive du corps (velours de différentes couleurs).

Voici un autre cliché intéressant où vestons blancs et kaki sont mêlés.
Une tenue kaki fut en effet introduite en 1912, sans faire l'objet d'une description précise. En principe, elle était destinée aux travaux salissants à bord ou dans les ateliers (ici peut-être des mécaniciens principaux de troisième classe) et ne comportait à l'origine aucune marque de grade, ce qui imposait le port de la casquette. En 1923, son utilisation serait élargie, en dehors des cérémonies, en lieu et place de la tenue blanche jugée trop salissante. Ceci amènerait la création de pattes d'épaule en toile kaki, permettant la disparition des pattes blanches sur le veston kaki, lesquelles d'ailleurs n'étaient pas prévues par la réglementation en 1920...
Les casquettes blanches étaient alors naturellement sans écusson frontal ; ce dernier n'apparaîtrait qu'en 1927 pour les officiers subalternes et supérieurs. La casquette d'au moins un mécanicien principal de 3e classe (sans doute, puisqu'il porte un veston kaki) ne comporte pas de galon autour de sa cuve, mais un ovale frontal (sans doute en velours violet pensée) portant un petit galon or ; il s'agit d'une casquette dite "de mer".

Voici des pattes d'épaule blanches et des pattes d'épaule kaki.

Pour terminer, voici le message trouvé dans cet album de campagne, qui était adressé aux fistots entrant à l'École navale en 1919 par leurs anciens, désormais aspirants. Il vaut d'être lu.
"Les nobles traditions qui perpétuent la gloire et la puissance de la Marine, c'est dans les plus naïves traditions qu'on apprend leur pouvoir de camaraderie, et comment il faut les suivre." Attacher à l'uniforme une grande importance comme nous le faisons est sans doute considéré par certains comme naïf ou futile, mais cet uniforme fait partie de nos traditions et perpétue donc la gloire de l'institution !
Bonjour,
Il est à noter que les pattes d'épaules blanches présentées ici, sont du modèle d'octobre 1913.
Les pattes adoptées en février 1912 étaient "semi-rigides" et ne comportaient pas de pattelette arrière. elles étaient fixées sur la tenue à l'aide de trois agrafes anglaises.