La Tapageuse était une canonnière contre sous-marins du type Ardent entré en service en octobre 1916, un petit bâtiment donc, de 60 mètres de long, armé de deux pièces de 100 mm, d'un lance-grenade et de mitrailleuses. Son équipage comportait 55 hommes. En 1917-1918, il fut affecté à la 9e division de patrouille en mer Égée pour lutter contre les sous-marins.
Nous voyons ici certains de ses détails, alors qu'il était en fin d'armement à Toulon. Un matelot prend la pose avec une mitailleuse Saint-Étienne modèle 1907 installée sur un affût permettant le tir contre avions. Cette mitrailleuse était peu adaptée aux combats dans les tranchées (mécanisme compliqué s'enrayant facilement) et fut donc à partir de 1917 retirée des premières lignes à terre. Nombre d'unités navales en récupérèrent alors.
L'emploi contre avions devait être peu commode pour le tireur, placé dans une position très inconfortable. On peut également douter du caractère pratique du réglage en site par le petit volant actionnant une vis sans fin sur laquelle venait reposer une bonne partie du poids de l'arme.
Ce matelot au bonnet portant sur son ruban la légende de son bâtiment ainsi que les ancres dorées diamant contre diamant, est dans une tenue qui s'apparente à la n°11 de 1928 (pantalon en drap, vareuse en molleton, bonnet, pas de chemise blanche donc pas de col) mais ne figure pas dans la liste de 1910. Il faut rappeler que le col bleu devint officiellement amovible le 12 mai 1911, ce qui eut pour effet de supprimer la chemise blanche. Dès lors le col bleu ne fut plus considéré que comme un accessoire dont le port dans certaines circonstances s'avérait inutile.
Voici un autre matelot de la Tapageuse. Il est photographié à côté du lance-grenade.
Ce marin porte une tenue de chauffe en toile bleue qui paraît très délavée. Créée en 1892, ces effets, comprenant veste – il existe plusieurs coupes pour celle-ci – et pantalon, furent distribués progressivement à d'autres spécialités que les chauffeurs et mécaniciens initialement dotés, tels que les torpilleurs et les canonniers.
Nous pouvons douter de l'efficacité d'un tel dispositif de lance-grenades quand il fallait 75 kilos d'explosif à 20 mètres (500 kilos à 50 mètres) pour qu'un sous-marin subît des dommages tels qu'il coulât ou eût à faire surface : "Le jet des petites grenades est opéré à la main : quant aux autres on les laisse tomber par leur propre poids, grâce à un mécanisme à déclic, du haut du rail situé à l’arrière des navires. On a cherché également à lancer des grenades à l’aide de mortiers. Malheureusement, ces appareils manquent un peu de précision. En outre, si l’on veut leur faire lancer, une charge puissante à une portée efficace, il faut disposer des plates-formes solides sur le pont des navires. Ceux-ci ne sont pas toujours en état de supporter la réaction du tir" (René La Bruyère, L'échec de la guerre sous-marine, Revue des Deux Mondes, 6e période, tome 47, 1918, p. 654). De manière générale se posait la question de la puissance de l'armement des bâtiments anti-sous-marins en regard de celle des submersibles allemands...
Après la guerre, la Tapageuse fut transformée en drageur de mines ; le "gadget" lance-grenade fut alors débarqué.
Photos de l'ECPAD
une photo de l'équipage prise en 1919