Il y a quelques années, le magazine La Baille de l'association des anciens élèves de l'Ecole navale, désormais magazine des associations d'officiers de la marine, présentait ce tableau d'un aspirant de 2e classe sous le Second Empire (en atteste l'ancre brodée de casquette surmontée de la couronne impériale) que nous considérons en tenue "composite". Aspirant de 2e classe, car le galon et les aiguillettes comportent des parties bleues ; "composite" car, si l'on se réfère au décret du 29 janvier de cette année-là, il ne s'agit pas de la petite tenue telle qu'elle y est décrite.
Rappelons d'abord que, de 1848 à 1910, il y avait des aspirants de 2e classe et des aspirants de 1re classe. Cette dernière année, les aspirants de 1re classe devinrent enseignes de vaisseau de 2e classe.
En 1853, la petite tenue des aspirants était la seule comprenant la veste courte à coupe droite à 12 boutons introduite en 1848 – elle en comptait 15 avant ce millésime. Mais cette petite tenue ne comportait ni le ceinturon bleu et or, ni les aiguillettes. Ces dernières n'étaient pas nécessaires, donc leur port n'était pas prescrit, pour signifier le grade, puisqu'un galon or avec ou sans ses brides bleues était porté au bas des manches. Pourtant, ces aiguillettes sont régulièrement présentes sur les tableaux et les premières photos d'aspirant à la fin des années 1840.
Les aiguillettes des aspirants de 1re classe étaient intégralement or ; celles des aspirants de 2e classe or avec quelques tronçons bleus.
Ces aiguillettes apparurent sur l'épaule droite des élèves de marine – ainsi étaient appelés les élèves officiers et aspirants de marine de 1816 à 1848 – en 1816, si l'on donne foi aux illustrateurs, mais pas au texte relatif à la création du Collège royal de marine d'Angoulême, qui fixe en particulier l'uniforme de ces jeunes gens. Les aiguillettes remplacèrent le trèfle qui avait été porté sur l'épaule gauche par les aspirants de 2e classe à partir de 1810. D'ailleurs la partie supérieure des aiguillettes des aspirants prit la forme de ce trèfle, ainsi qu'en atteste les aiguillettes d'élève de 2e classe présentées ci-dessous, du modèle réglementaire sous la Monarchie de Juillet (les tafferons ou ferrets y sont ornés de la couronne royale).
Ci-dessous le portrait d'un élève de 1re classe (aiguillettes sans parties bleues) sous la Monarchie de Juillet. Sa petite tenue de bord est conforme au décret du 20 juillet 1837, à une exception toutefois : le gilet en blanc est en principe à boutonnage droit et pas à coupe croisée avec un double rang de boutons.
Voici enfin deux autres portraits d'aspirants sous le Second Empire. Celui de gauche est d'un aspirant de 2e classe en grand uniforme tel que défini en 1853 (habit non brodé, pantalon sans bande or, chapeau monté sans glands aux cornes, ceinturon bleu et or auquel est suspendu le sabre avec une dragonne en poil de chèvre noir, chapeau monté avec une ganse en galon plat, aiguillettes or et bleues), tenue ici parfaitement réglementaire. Ni galon aux manches, ni épaulettes, ce qui justifie le port des aiguillettes pour signifier le grade.
Le portrait de droite est d'un aspirant de 1re classe (plus de brides bleues sur les galons, dragonne en or à petites franges libres) en petite tenue, avec les mêmes écarts que le premier portrait de ce billet : port des aiguillettes et du ceinturon bleu et or. Une petite fronde vestimentaire courante pour des jeunes gens, chez le photographe ou le peintre, mais sans doute pas à bord du vaisseau-école Borda...
Pour en savoir plus sur les tenues des aspirants, vous pouvez consulter nos premier et troisième ouvrages : Les uniformes des officiers de la marine. 1830 – 1940 et Les marins français. 1789 – 1830.
La transgression n’est elle pas dans la nature des midships ? :)